Radialsystem : dansez sans oublier

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C’est autour d’un ballon que tout a commencé. En 2008, Norbert Kron, allemand (50 ans), et Amichai Shalev, israélien (42 ans), se rencontrent sur la pelouse d’un stade alors que chacun fait partie de l’équipe nationale de football « d’auteurs » de son pays. Progressivement, une amitié naît entre les deux hommes en dehors des terrains de foot puis leur vient l’idée d’une collaboration sur le thème des relations entre Israéliens et Allemands. « À l’école, j’ai grandi avec les thèmes de la Seconde Guerre mondiale et de l’Holocauste sans cesse rappelés de façon extrême. Puis, dans le cadre de ces compétitions de football, j’ai vu que l’on pouvait se rencontrer en toute simplicité et que des amitiés pouvaient naturellement se former », explique M. Kron. Son ami renchérit : « En Israël, le passé est la chasse gardée de beaucoup d’institutions officielles. Depuis des années, elles nous enseignent comment l’appréhender. Il fallait rafraîchir cette approche. »

Les deux amis s’attèlent au projet. Ensemble, ils réunissent 19 auteurs allemands et israéliens, auxquels ils demandent d’écrire au sujet de l’autre pays. « Tous avaient un rapport étroit avec Israël ou l’Allemagne, soit parce qu’ils s’y étaient souvent rendus, soit parce qu’ils avaient travaillé sur les sujets de la mémoire et de l’Holocauste », indique M. Kron. Les récits sont rassemblés pour former l’ouvrage Wir vergessen nicht, wir gehen tanzen (« Nous n’oublions pas, nous allons danser ») qui paraît début 2015 en allemand et en hébreu chez S.Fischer. L’ouvrir, c’est se plonger dans ces histoires personnelles, où les auteurs racontent librement et avec humour leurs impressions et la relation qu’ils partagent avec l’autre pays.

Tout est dans le titre. Même si l’Histoire ne quitte jamais les pensées, il est maintenant possible d’avoir des rapports normalisés et d’aller danser. « On ne dit pas assez qu’il existe des relations décontractées et des amitiés entre Allemands et Israéliens. La réalité est très différente de la situation présentée dans les médias », poursuit M. Kron. Un long chemin a été parcouru avant qu’une telle situation soit possible. Les évolutions ont été multiples, tant sur le plan politique et diplomatique, que sur un plan plus individuel. Alors qu’auparavant, il était « tabou d’entendre parler allemand au sein de la Knesset, l’Allemagne est aujourd’hui l’un des meilleurs alliés d’Israël ». Cette année, les deux pays fêtent d’ailleurs le jubilé de la reprise de leurs relations diplomatiques. En parallèle, de nouvelles générations qui n’ont pas connu la guerre et qui entretiennent un rapport moins douloureux avec le passé sont nées. « Du côté israélien, la troisième génération a grandi dans un univers différent et surtout dans un monde global. La plupart de ces personnes s’envisagent comme des citoyens du monde, avant de se considérer comme juif et Israélien », explique M. Shalev.

Après la publication de Wir vergessen nicht, wir gehen tanzen, les deux amis accompagnés des auteurs participants ont entamé une tournée entre l’Allemagne et Israël afin de présenter le recueil et d’engager des discussions avec les locaux. La joyeuse troupe passera par la capitale allemande le 13 avril prochain au Radialsystem afin de réaliser un colloque. La soirée sera rythmée par les récits des auteurs, les chorégraphies de Katharina Maschenka Horn et de Nir de Volff et la mélodie d’Assaf Gavron. Une fête en l’honneur des deux cultures et animée par DJ Doctor Plesman clôturera la soirée.

Photos : Copyright Norbert Kron

Camille Baissat

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